Les Nébulosités
Paul, c'est un peu comme la boîte à biscuit de notre très vieille grand-mère que nous n'avons pas vu depuis quelques dizaines d'années.
La boîte est magnifique, elle fait sourire par ses couleurs, son charme d'antan, par sa simplicité aussi. Pourtant quand on la touche, elle est froide, ce n'est que du métal.
On se demande ce qu'il y a l'intérieur. Des biscuits rassis devenus immangeables, de certains que l'on peut comparer à des bombes-en-bouche ou de parfums que l'on croyait oublier ?
Je vais vous ouvrir la boîte de Paul Camus, à vous de savoir si vous vous y risquez d'y goûter.
(Les rêves de Paul, tirés de RP ou - surtout - inédits, seront regroupés ici, permettant d'être spectateur de son tourment vis-à-vis des esprits. )
Colère - tiré du RP "L'aventure commence" avec Mélusine
Mélusine était partie. Depuis longtemps. Mais je fixai toujours la fenêtre, perché dans cet appartement qui n'est mien.
Tiens. Il commence à pleuvoir. Des ficelles d'eau noire coulent des nuages, des nuages si haut, si loin, que je n'arrive pas à les retrouver dans cette étendue bleue-grisâtre.
Tout ce qui m'entourait se fragmentait, se pixelisait, se détachait de l'espace et tourbillonnait lentement. Même le ciel se fragmentait en mosaïque bleues. Puis tout devint noir.
J'avais encore les pieds ancrés dans le sol, un parquet froid.
Une faible lumière tamisée s’entremêla faiblement dans les ténèbres. Il était là.
J'humai de douces couleurs brunes, flottant dans les airs. Elles s'insinuaient dans tout mon corps, dans ton mon être.
" Ça fait longtemps, en effet, répondis-je acidement "
Quelques particules jaunes, petites lucioles éthérées, dansèrent sur ma peau nue. Je vibrais. Mais pas mon cœur.
" Tu m'as caché beaucoup de choses on dirait, même que tu n'es peut-être pas juste sorti de mon imagination. Je t'avoue ne pas avoir encore compris. J'ai au moins compris que tu m'as menti. "
Chacun de mes mots étaient acérés. Une coulée rouge sang se glissa entre mes pieds et le sol. Je me sentais trahis, alors que je ne savais même s'il faisait partie de tout cela. Pas plus que tout cela existait. Mais mon visage ne pleurait pas. Il était trop facile de pleurer dans ces moments là.
" Qui es-tu au juste ? "
Je me retournai, sans bouger de place, comme une danseuse en pointe. Mes mouvements étaient graciles, lestes et d'une légèreté impossible. Je n'étais pas gauche, rouillé et pitoyable.
Je le fixai. J'imagine que sa forme change par rapport à notre conception visuelle de ce qu'il est.
Pour moi il représentait une étoile. Un point lumineux et inaccessible.
Des effluves vertes caressait chaque parcelle de mon corps.
" Tu ne peux pas me répondre ! C'est trop facile ! hurlais-je."
Une rivière de larme débordait de ma voix. J'étais désespérément en colère. Pourtant rien dans ma gestuelle ne laissait transparaître la moindre émotion à l'exception d'une sérénité totale.
Ma peau se teint en noir.
" Biscuit il en a marre ! Je ne suis qu'une de tes marionnettes cassées ! T'inquiète pas je comptais pas m'enfuir ! Moi je m'assume un minimum ! Je vais aller la voir cette femme ! Mais dégage ! Juste dégage ! "
Il hésita. Il s'approcha de moi un petit peu, comme pour me tendre la main.
" Dégage. "
Il se brisait. Comme un miroir. Puis il devient poussière. Elle se répandait dans la pièce puis s'éleva infiniment dans un noir plus profond encore qu'il ne l'était déjà.
Mon rêve commençait. J'étais sur une large scène, toujours dans ce noir impalpable entremêlé de lumière. En face de moi, des milliers de personnes étaient assises. Je ne les distinguais pas. Il faisait trop sombre.
Le temps se suspendu sans bruit, et commença alors, une simple danse de la nuit.